Entrevue avec George S. Grant, Brand Ambassador mondial de la distillerie Glenfarclas

Entrevue avec George S Grant, Brand Ambassador mondial de la distillerie Glenfarclas, par Fred Laroche, membre du Club de Whisky de Québec.

Traduction de l’entrevue qui s’est déroulée en anglais.


Fred Laroche – Club de Scotch de Québec: Bonjour George! Comment aimes-tu la ville jusqu’à présent?

George S. Grant – Glenfarclas: Je suis arrivé sur l’heure du midi et jusqu’à présent j’aime bien la ville. C’est ma toute première fois ici.

FL: Il y a donc encore des endroits où il y a des buveurs de whiskies que tu n’as pas visités!

GSG: En effet, il y a encore beaucoup d’endroits que je n’ai pas visités. Le marché du Whisky est en constante expansion et je suis heureux de constater que l’intérêt pour Glenfarclas se propage. Je suis également heureux de voir que la SAQ accorde de l’importance aux produits de Glenfarclas.

FL: Est-ce qu’il y a des endroits dans le monde où tu es surpris qu’on y retrouve du whisky?

GSG: Il y a des endroits étranges qui me surprennent toujours. Les endroits éloignés comme certaines îles dans les caraïbes ou ailleurs, où le bar local est dans la seule grange sur l’île et que, quand tu y vas, tu te rends compte que la seule bonne bouteille qu’ils ont en est une de whisky! Il y a également beaucoup d’histoires de gens qui voyagent dans des endroits étranges et qu’ils ramènent une bouteille rarissime qu’ils ont trouvée à la boutique hors-taxes là-bas. C’est également vraiment spécial d’aller dans le nord de la Russie, près du cercle polaire, et te rendre compte qu’il y a de très bonnes bouteilles de whisky.

FL: Quelle est la plus vieille bouteille de Glenfarclas que tu as vue jusqu’à maintenant?

GSG: Nous avons plusieurs vieilles bouteilles à la distillerie. Nous avons des bouteilles qui ont plus de 115 ans mais c’est tout de même un whisky de 8 ans qui s’y trouve.

FL: Je vais te laisser le soin de nous parler des whiskies que nous allons goûter ce soir et me dire ce que tu en penses.

GSG: D’accord. Eh bien nous avons évidemment la gamme disponible en SAQ. Nous avons le 12 ans, qui est malheureusement en rupture d’inventaire pour le moment mais qui reviendra très bientôt. Nous avons le 15 ans, le 17 ans et le 25 ans. Finalement, nous avons 2 embouteillages spéciaux qui ne sont pas disponibles en SAQ, le 105 et un whisky de 40 ans.

Tout d’abord, l’embouteillage de 12 ans d’âge est la plus jeune expression de Glenfarclas et nous le produisons strictement pour l’exportation. Il est en vente à quelques endroits au Royaume-Unis mais c’est très rare. Pour moi, c’est vraiment le whisky qui représente le nom de Glenfarclas. Glen vaut dire vallée et Farclas veut dire prairie. Il a vraiment ces notes herbacées qui font de lui un whisky tout en verdure.

Ensuite, nous avons le 15 ans et le 17 ans. Fait intéressant, imagines-toi donc que le Canada est le seul endroit dans le monde où l’on retrouve ces deux expressions. En Europe, il y a le 15 ans et en Asie et aux États-Unis, il y a le 17 ans mais ici, il y a les deux. C’est également la première fois où je vais faire une dégustation avec les deux comparés un à la suite de l’autre. Ce sera donc intéressant de voir les gens réagir sur les différences entre les deux.

Le 15 ans est très robuste et contient beaucoup d’influences des fûts de Xérès. Il a des notes de citron et a beaucoup de cette sensation sucrée qu’on a avec Glenfarclas. Il est embouteillé à 46%. Le 17 ans, en revanche, laisse une sensation de beurre en bouche, est embouteillé à 43% et à une finale plus sèche.

En ce qui concerne le 25 ans, ça dit 25 ans sur l’étiquette et c’est exactement que ce que ça dit en bouche! Il y a beaucoup de tanins rouges que tu pourrais associer à un bon Bordeaux par exemple. La chose la plus frappante du 25 ans est sa finale. Il a une grosse finale persistante de chocolat noir amère.

Pour ce qui est de l’embouteillage de 40 ans, le but était de rendre disponible un whisky de 40 ans qui serait accessible à tout le monde. Ce n’est pas un whisky dispendieux. Il se vendrait probablement autour de 600$ ici. Ses saveurs sont très intenses. Il a beaucoup de noix en bouche, très sucré, beaucoup de bois. C’est un whisky très intense.

Finalement, nous avons le 105, qui est notre embouteillage à force du fût. Il est embouteillé à 60% d’alcool et c’est un whisky de 10 ans. Il comporte un profil similaire à ceux que je t’ai décris, mais beaucoup plus intense.

FL: Ça promet. Une chose que l’on remarque immédiatement à propos de Glenfarclas est le côté familial de la distillerie. Quelle génération représentes-tu exactement et quel est le futur de la distillerie à ton avis?

GSG: Glenfarclas a été établie en 1836 mais ma famille a acheté la distillerie en 1865. Je suis donc la sixième génération à travailler à la distillerie. Ce serait vraiment facile de prendre la décision de vendre la distillerie mais nous ne pouvons vendre quelque chose qu’une seule fois et nous ne voulons pas le faire alors nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour que Glenfarclas demeure une entité de propriété familiale et c’est avec l’encouragement de clubs comme le vôtre et des buveurs de whisky de partout dans le monde que nous allons y arriver. Pour le futur, il y a de plus en plus de gens qui supportent Glenfarclas mais il y a également de plus en plus de gens qui s’opposent aux grosses industries, se rapprochant donc des distilleries indépendantes, comme la notre.

FL: Une autre chose que l’on remarque en regardant une bouteille de Glenfarclas est que l’étiquette est toujours très modeste et que vous ne semblez pas mettre beaucoup d’emphase sur la mise en marché des produits…

GSG: En bout de ligne, nous voulons que le Whisky parle pour lui-même. Nous voulons que le contenu de la bouteille se vende de par lui-même. Nous pourrions bien entendu mettre tous les prix que nos bouteilles ont gagnés mais nous voulons que ce soit le goût individuel de chacun qui pousse vers le choix de Glenfasclas. Nous sommes une distillerie familiale et nous n’avons pas de département de mise en marché. Nous n’avons encore moins d’argent à mettre là-dessus. La seule chose que nous avons pour vendre est ce qu’il y a dans la bouteille.

FL: En tant que buveur de whisky, quelle serait ta gamme de prix de prédilection?

GSG: Eh bien je dois avouer que je n’achète pas beaucoup de bouteilles de whisky. Même que j’irais jusqu’à dire que je ne sais pas vraiment ce que vaut tout ce que je goûte parce que je vais à beaucoup de dégustations et qu’on m’y donne souvent des whiskies à goûter. Tu dois comprendre que, dépendamment des régions, chaque whiskies ne valent pas nécessairement la même chose. Par contre, je ne crois pas que le prix soit le seul gage de qualité d’un whisky. Il y a des gens qui se donnent des limites de prix inférieures pour leurs achats et je crois que ces gens manquent beaucoup parce qu’il y a de très bon whisky qui sont souvent en dessous de leur palette de prix. C’est la même chose avec l’âge. Il y a beaucoup d’amateurs de whisky qui renoncent à essayer des whiskies de 8 ou 10 ans d’âges alors qu’il se fait des merveilles dans cette gamme. C’est également très important de revenir en arrière et redonner une chance à un whisky qu’on a déjà essayé parce qu’une nouvelle production sort à chaque année et il y aura nécessairement des différences, aussi minimes puissent-elles être.

FL: La technologie est partout. À quelle point crois tu que la technologie a influence le monde du whisky?

GSG: En ce qui concerne les grosses compagnies, beaucoup! En ce qui concerne Glenfarclas, aucunement! J’irais même jusqu’à dire que mon grand-père est anti technologie, si une telle chose existe! La seule chose par rapport à la technologie qui sert à notre travail est l’avancement en communications. La vitesse de transmission de l’information est beaucoup plus rapide. Ce n’est pas rare de voir un amateur de whisky dans un magasin, en train de regarder le cabinet des bouteilles de whisky et faire des recherches sur internet sur les produits à partir de son téléphone.

FL: Justement, avec l’internet, les communications sont tellement devenues faciles que tout le monde semble avoir son mot à dire sur tout. Quelle est la chose la plus étrange que tu aies lu au sujet de Glenfarclas?

GSG: Il y a toujours les trucs habituels comme le fait que nous avons vendu la distillerie ou que nous faisons quelque chose de différent. Mais honnêtement, l’histoire la plus drôle que j’ai lue sur une distillerie n’était pas sur Glenfarclas mais bien sur la distillerie Arran Malt. Cette distillerie est très jeune, elle a 15 ans aujourd’hui. Au moment de cette histoire, elle avait 10 ans d’activité. L’histoire veut que quelqu’un se ventait d’avoir trouvé un veille embouteillage très rare de Arran Malt 15 ans, alors que la distillerie n’en avait que 10.

FL: Je vais te laisser terminer avec une anecdote que tu retiens d’une dégustation comme celle que nous allons avoir ce soir!

GSG: J’ai évidemment plusieurs histoires, que j’essaierai d’ailleurs de vous raconter ce soir. Les dégustations de whisky devraient être un évènement plaisant. Je suis très chanceux de pouvoir voyager et partager ces expériences avec les gens. Les barrières linguistiques sont souvent un problème mais nous sommes tous rejoints par cet intérêt commun. La dégustation la plus étrange que j’ai vécu à date est en Écosse!

Je n’avais pas réalisé à quel point c’était loin de chez moi quand je m’y suis rendu alors je suis arrivé à cet endroit où je commençais à installer mon portable pour la présentation et j’ai remarqué qu’il y avait environ 90 chaises dans la salle. Je trouvais que c’était beaucoup. L’organisateur est venu me rejoindre pour me dire qu’il y avait un problème. Je me suis dit qu’il n’avait pas vendu de billets et que personne ne viendrait à la dégustation mais je me trompais! Il m’a amené dans la pièce d’à côté, qui était préparée exactement de la même façon, avec pas moins de 80 autres chaises. Je lui ai demandé ce qu’il se passait, s’il faisait deux dégustations ou quoi… Il me répond : « Ça ressemble à ça oui ». Et moi je lui réponds naïvement : « Ah oui? Qui fait l’autre dégustation? » et il me répond: « Toi! ». J’étais mal à l’aise car c’était hors de question que je me tienne dans le corridor à crier à travers les portes pour parler aux gens. Il m’a dit: « pas de problème, Georges. Tout ce que tu as à faire, c’est faire les 3 premiers whiskies dans cette pièce, prendre la pause, venir faire les 3 premiers whiskies dans l’autre pièce, revenir terminer ici et retourner terminer là-bas! ». Heureusement, j’ai eu l’idée de lui demander combien de whiskies que nous allions goûter… sinon j’aurais eu la surprise car sa réponse à été 9!

J’ai donc commencé la dégustation avec les trois premiers whiskies dans une pièce, pas de problème! Je suis traversé dans l’autre, aucun problème encore. Je suis revenu dans la première pour faire les 3 suivants… et je me suis rendu vers la deuxième, qui était d’ailleurs la plus agitée des deux et c’est là que ça m’a frappé, ça faisait 9 whiskies que je consommais! Mais ce n’est pas ça le pire… mais bien les 9 autres whiskies qu’il me restait! Inutile de te dire que je ne me souviens pas avoir terminé cette dégustation. À la fin de la soirée, mon portable était dans une pièce, mon écran dans le corridor et mon projecteur dans l’autre pièce! C’est la seule dégustation que je ne me souviens pas avoir terminée!

FL: Merci beaucoup pour ton temps Georges!

GSG: Merci à vous de me recevoir!