Je mentionne souvent qu’un single malt scotch se boit avec respect. Une boisson qu’on laisse reposer, mûrir, vieillir pendant 10, 12, 15, 25, 30 ou même 40 ans mérite tout le respect du privilège qui nous est donné d’y goûter.. Même si, je dois l’avouer, les single malts les plus âgés que j’ai eu l’occasion de déguster à cette date ne m’ont pas apporté les plus belles expériences de dégustation, du moins au niveau « gustatif », et tout en considérant les attentes que j’avais au départ.
Plusieurs choses me trottent dans la tête à toutes les fois que j’ai la chance de goûter un single malt d’un âge certain. Quelques-unes des pensées qui me reviennent souvent sont: « Mais qu’est-ce que je faisais, moi, voilà 10, 12, 20 ou 30 ans, au même moment où des gens, en Écosse (ou ailleurs) mettaient à vieillir ce single malt? » ; « Qu’est-il arrivé aux gens du temps? »; Sont-ils toujours en vie? ».
Je pense également au fait qu’il y a probablement en ce moment même, en Écosse, d’autres gens qui mettent des fûts de new make spirit à vieillir, et que, avec un peu de chance, je pourrai, dans quelques années, initier mon fils à déguster cette merveilleuse boisson et qu’il vivra la même expérience que moi dans 30 ou 40 ans. Peut-être pensera-t-il, lui aussi, au fait que ce single malt a été fabriqué lorsque son père avait 40 ans, voilà bien longtemps…
Lorsque je me suis finalement assis à ma table, cette soirée du 1er octobre, devant mes verres de Highland Park dont le dernier était le 40 ans, mon esprit s’est rapidement évadé.
Quarante ans… au début 1967… j’avais quelques mois seulement. Je n’avais même pas appris à marcher. Les Canadiens de Montréal allaient gagner une autre coupe Stanley, les Beatles étaient au sommet de leur popularité, Martin Luther King avait un rêve…
Moi, j’apprenais à découvrir le monde qui m’entourait, j’étais une éponge qui allait absorber toutes sortes d’informations qui allaient me transformer, à travers diverses expériences, rencontres et aventures et qui feraient de moi l’homme que je suis aujourd’hui, 40 ans plus tard, avec mes traits distinctifs, ma « typicité personnelle ».
Pendant cette même période, à plus de 5000km de là, en Écosse, quelqu’un avait mis un fût en période de vieillissement, en espérant que celui-ci donnerait un single malt de goût et de classe particulière. Il n’avait certainement pu imaginer que celui-ci, vieillirait, tout comme moi, pendant plus de 40 ans, en s’imprégnant de son environnement, en se donnant lui aussi une identité unique. 40 ans plus tard, l’homme que je suis et ce fût, délesté de plus de 50% de son contenu (les anges ne sont pas trop gourmands sur l’ile d’Orkney) se rencontraient dans une cave à vin de Toronto. C’est presqu’une histoire d’amour!
Highland Park 40 ans
Dégusté en exclusivité au lancement à Toronto le 1er octobre 2008.
André 91%
Comme le disait Marc Laverdière, ambassadeur de HP au lancement: » Il faut une certaine dose de courage afin de décider de ne pas embouteiller un malt à 25 ans, à 30 ans et attendre jusqu’à 40 ans afin de pouvoir en tirer ce qu’il a de mieux à nous livrer. » Juste pour l’expérience, de boire un single malt qui a été mis en vieillissement l’année de votre naissance, c’est quelque chose. Première impression: le nez est très sherry, mais « wow » tellement balancé finement qu’il vous enveloppe merveilleusement les narines. Suivent ensuite les vagues d’épices, de fruits et de chocolat noir. Finale légèrement tourbée et fumée, longue et très « sexy »